Toute personne en situation de mener des décisions collectives aura expérimenté que le format choisi pour la décision influe de manière significative sur l’issue des décisions : majorité, consensus, vote express ou non ? Combien de participants autour de la table ?
La COP21 a décidé de décider sous le format consensuel : chaque partie autour de la table est égale en voix, le vote est exclu (il mettrait en exergue les minoritaires, et pourrait empêcher la mise en place des décisions), le texte doit être adopté par tous, comme signe de son universalité.
La COP21 a également choisi de réunir la totalité des pays, en écho à la dimension planétaire de l’enjeu, quitte à prendre le risque que des pays de moindre impact sur les émissions de gaz à effet de serre mettent en échec un potentiel accord.
Les avantages de la décision par consensus sont nombreux, et répondent exactement à ce que l’humanité cherche à réaliser dans cette COP21 : l’appropriation de la décision par chacune des parties, permettant à la fois une facilitation de la mise en place et l’indispensable adhésion de tous les participants, est le gage de la réussite de ces décisions dans le temps.
Et pourtant, la décision par consensus s’accommode fort mal de l’une des contraintes majeures de cette conférence : la limite de temps.
En effet, décider par consensus, c’est choisir de prendre tout le temps nécessaire pour un « réel » accord de tous, sur une solution créée presque de toutes pièces par le débat. Une sorte d’accord « idéal » qui satisferait chacun sans nécessiter de réel compromis.
Une quête impossible à réaliser dans un temps imparti. Le carburant du consensus, c’est bien le temps. Une ressource rare, s’il en est, et dont ne semble pas disposer la COP 21. Même si d’ores et déjà, le délai du 11 décembre ne sera pas tenu, même pour un accord non contraignant.
A un moment, le principe de réalité devrait, nous semble-t-il, amener les participants à prendre la décision de changer de format, à défaut de changer de référence temporelle vu l’urgence de la situation climatique. Mais assumer l’échec d’un format de décision consensuelle, et sauver la décision en changeant de format, nécessite la présence d’un ou plusieurs leaders forts pour emmener le groupe vers cette nouvelle modalité de décision et le succès. Qui serait légitime pour emmener cette action ? S’agirait-il des pays représentant par exemple 75% des émissions de CO2, ou à l’inverse, les 75% des pays les plus touchés par le réchauffement climatique ? Au-delà d’une question de légitimité, qui en prendra l’initiative ? Comme l’indique Jean-Louis Borloo, nous sommes sans doute arrivés au bout d’un processus de négociation. Ajoutons qu’il est probablement temps de passer à mode décisionnel plus tranchant et de penser autrement notre avenir afin d’assumer pleinement nos responsabilités.
Ariseal